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RENCONTRE Avec Sophie GADONNEIX - Magazine Batiment - Entretien Mai / juin 2022

RENCONTRE Avec Sophie GADONNEIX - Magazine Batiment - Entretien Mai / juin 2022

"Quelle est la stratégie du groupe Aber Propreté dont vous avez pris les rênes en 2018 ?

Notre stratégie, aujourd'hui, est de continuer à pérenniser l'entreprise en garantissant son indépendance financière, mais également en nous appuyant sur des directions régionales et des agences autonomes. Nous entretenons une relation de confiance avec l'ensemble de nos salariés, qu'ils soient directeurs d'agences, encadrants ou agents, pour permettre un vrai travail de proximité avec nos clients. Il ne suffit pas de mettre des points sur une carte pour revendiquer une couverture nationale ! Notre objectif est que chaque directeur d'agence puisse impulser sa propre politique commerciale en fonction des spécificités locales, en s’appuyant sur la force du groupe. L'ADN de notre entreprise réside dans cette dynamique de proximité et d’autonomie, avec des services supports au service de nos agences.

Vous développez votre activité sur le terrain, mais vous affichez aussi une croissance externe. Sur quels critères choisissez-vous les structures que vous rachetez ?

Au cours de ces dernières années, nous avons racheté des entreprises de toute taille, depuis un petit fonds de commerce à Toulouse jusqu’à un groupe structuré réalisant plusieurs millions de chiffre d’affaires. Nous sommes ambitieux et ouverts aux opportunités de développement de plus ou moins grande ampleur, et nous avons les moyens de nos ambitions. L'objectif est de renforcer notre maillage au travers d'entreprises ayant un ancrage local. Notre modèle est clairement de nous développer dans des villes moyennes afin de pouvoir accompagner au plus près nos clients et fidéliser nos salariés.

Comment définiriez-vous votre rôle de chef d'entreprise à un moment où les métiers de la propreté sont sans doute mieux reconnus, mais également fragilisés par les différentes crises ?

La Covid a sans doute fait changer la vision que la population pouvait avoir sur nos métiers. Mais il nous a conduits aussi à revoir notre approche en faisant correspondre les contraintes de nos clients et celles de nos salariés. Nous allons devoir expérimenter des solutions différentes en fonction de l'environnement et de la ville où on intervient, tout en continuant d'être des experts du nettoyage. Être sérieux et professionnels passe par la fidélisation de nos salariés et par l'engagement à ne pas vendre tout et n'importe quoi à n'importe quel prix… Nous travaillons pour valoriser nos métiers, et  sommes heureux d’avoir été élus comme « Meilleur employeur 2022 » de la catégorie service aux entreprises par le magazine Capital.

Comment vous êtes-vous préparée à exercer cette fonction ? S'agit-il d'un rêve d'enfant... ?


Je répondrais oui et non ! D'un côté, dès l'âge de 12 ans, j'avais cette envie de reprendre l'entreprise familiale. Mais d'un autre côté, je nourrissais aussi le rêve de devenir ingénieure motoriste dans l'univers du sport automobile. D'où ma formation d’ingénieur généraliste. L'envie de poursuivre l'aventure de mes parents a été plus forte, sans pour autant être une évidence. Je n'ai pas été éduquée comme une héritière... Il était important que je fasse mes preuves et surtout que je m'inscris dans la suite du travail et des engagements pris par mes parents. Il faut garder cet ADN de proximité, d'attachement à l'humain, mais aussi à la décentralisation et au partage des responsabilités. C'est un travail à plein temps riche et passionnant.

Ne craignez-vous pas justement que la crise renforce les exigences de vos donneurs d'ordres, notamment en matière de prix et de durée des marchés ? Faut-il aller vers une logique de propreté à la demande ?

Pour rebondir sur ce dernier point, je dirais que la notion de « propreté à la demande » de type Uber, est d'abord un concept marketing, et qui sera possible dans des ensembles immobiliers où notre présence est permanente. Nous devons bien entendu nous adapter aux demandes de nos clients, mais nous devons aussi les faire coïncider avec les attentes et les contraintes des salariés, aussi bien en termes de déplacements que d'organisation du travail. Le travail en journée fait partie de ces défis à relever qui ont du mal à se concrétiser. C'est un préalable pour attirer de nouveaux salariés vers les métiers de la propreté. Pour ce qui est des conditions dans lesquelles sont passés les marchés, je pense que les acheteurs ne sont pas les seuls responsables
de ces évolutions, et que les entreprises de propreté ont une responsabilité dans la baisse du niveau d’exigence. Je me définis volontiers comme une militante du « faire ce que l'on dit ». J'ai été éduquée dans ces valeurs de respect et de proximité relationnelle avec nos salariés tout en étant « créateurs de satisfaction » pour nos clients.

Comment, selon vous, peut-on concrètement valoriser le métier et les prestations qui sont proposées par vos entreprises ? La solution passe-t-elle par plus de diversification ?

Je pense qu'il faut être créateur de satisfaction pour nos clients comme pour nos salariés, en étant toujours plus proches, flexibles et réactifs. Au-delà des mots, cette exigence passe par l'accompagnement et la montée en compétences de nos agents et encadrants, notamment au travers de notre structure de formation, créée en 2010. Pour moi, la solution ne passe pas par la diversification, mais en étant des experts du métier, en visant toujours la satisfaction des clients. Par ailleurs, je pense que nous avons beaucoup à apprendre de nos prestations dans des secteurs spécifiques ou de niche, comme la santé ou l'ultrapropreté. Cette expertise nous permet de déployer ces protocoles, dans le tertiaire par exemple. Ces savoir-faire sont aussi une vitrine qui met en avant nos collaborateurs.

La crise sanitaire a-t-elle remis en question votre organisation ou la nature de vos relations au sein de l'entreprise ?

En mars 2020, le jour où tout s'est arrêté, nous avons décidé sans hésiter de continuer à servir tous nos clients encore en activité. Nous sommes restés parfaitement sereins car nous étions  parfaitement légitimes pour intervenir au coeur de la crise. Ensuite, la levée des restrictions nous a permis de revivre des moments ensemble, c'est essentiel de pouvoir à nouveau accueillir nos salariés et nos clients dans les agences. Aujourd'hui, un des enjeux reste le recrutement et la fidélisation. Entre 2020 et 2021, le nombre de CV a été divisé par deux. Nous devons être attractifs pour les candidats, et plus que jamais sur le terrain à leurs côtés, c’est le rôle de notre encadrement et mon rôle en tant que présidente.

Justement quel est le profil de vos directeurs d’agences et encadrants ?

Nous n'avons pas de profil type. Nous souhaitons intégrer avant tout des managers qui partagent nos valeurs et les incarnent grâce à leurs qualités relationnelles en étant proches et à l’écoute des équipes, mais aussi grâce à leur capacité à savoir être autonomes, prendre des décisions et être curieux. Je cherche des directeurs d’agences qui ont des compétences de gestionnaires et qui sont de bons commerciaux ou qui sauront l’être. Nous cherchons surtout à intégrer des gens qui ont la volonté d’emmener les équipes vers un objectif commun en portant les projets et en donnant du sens. La capacité à savoir jouer en équipe, à avoir le sens du collectif, est une qualité primordiale pour être un bon manager dans nos métiers."

Source : Magazine BATIMENT ENTRETIEN - Mai/Juin 2022 - pages 30 à 32.